Il
est né le 18 juillet 1906 à Pexonne, village de Meurthe et Moselle,
mi-agricole mi-ouvrier ; 4ème
enfant d’une famille qui compte déjà 2 filles et 1 fils. Son
père est le maire du village, comme une
centaine d’hommes et de femmes il travaille à la
tuilerie-faïencerie appartenant à Fenal Frères. Magasinier, il jouit
de la confiance de ses patrons : Messieurs DE VITRY et DE VILLERMONT. Jean,
après l'école primaire, intègre l'école professionnelle de la rue des
Jardiniers à Nancy. Entre 1920 et 1925 le travail est rare, finalement
Jean EDELBLOUDE trouve à la saline de Dieuze (Moselle), un emploi de
dessinateur et prépare, tout en
travaillant, un concours administratif,
qu’il réussit. Il commence sa carrière au
bureau des Contributions Indirectes de la ville. Il y rencontre une
jeune institutrice. Ils s'aiment, se marient; nous sommes en 1936. Tous
deux apprécient d’exercer leur activité dans la même commune . Hélas,
le bonheur ne dure pas, l’horizon s’assombrit. Septembre 1939, la guerre est
déclarée. Jean
est mobilisé comme sous-officier dans un régiment sur la frontière Nord-Est,
défendue par la Ligne Maginot, que l’on dit infranchissable… Printemps
1940, l'armée allemande viole la neutralité de la Belgique et prend l’armée
française par revers. Celle-ci recule
pour échapper à l’avance allemande. C’est le début de l’occupation du
pays qui va durer 4 longues années. Des
régiments entiers sont faits prisonniers. Jean a la chance, malgré
l'incroyable désordre régnant sur les routes de France (piétons, soldats, réfugiés,
chevaux, cycles, voitures, objets hétéroclites, bombardés par les STUKAS
allemands qui piquent à 100 mètres du sol) de parvenir avec son régiment en
zone libre dans la région de Moissac. Pour lui, démobilisé, il est impossible de revenir à Dieuze, annexée au Grand Reich. Ce n'est qu'au 1er novembre, après de nombreuses démarches, tracasseries, astuces et beaucoup de chance, qu'il réussit à rejoindre Pexonne. Son
épouse et son fils aîné (né le 12 juillet 1940 et qu'il n'a pas encore vu)
l'y attendent, installés dans la maison
de la mère de Jean. Sa femme aurait pu continuer à occuper son poste
d’enseignante à Dieuze si elle avait accepté, comme le lui proposait les
Allemands, de divorcer et d’adopter la langue allemande en cours et dans la
vie quotidienne. Madame
Edelbloude, institutrice à Pexonne, remplace
une collègue israélite limogée. Jean, lui, trouve un poste aux Contributions Indirectes à Blâmont. Malgré les hivers rigoureux, il fait, chaque jour, les 15 kilomètres qui séparent les deux communes. Les années passent, la Résistance s’organise et lance des actions. Le message du Général de Gaulle : « Harcelez l’ennemi sur sa retraite » est largement répercuté. La forêt omniprésente dans cette partie des Vosges et de Meurthe et Moselle est propice aux embuscades. Les représailles frappent les populations sans discernement. Certains villages vont payer un lourd tribu, c’est le cas pour Moussey, Charmes. A Pexonne, dimanche 27 août 1944, il est 7 heures du matin, c’est un déferlement de camions, d’automitrailleuses d’où surgissent des soldats allemands, le doigt sur la gâchette des mitraillettes. Après avoir cerné l’église où se déroule l’office matinal, ils fouillent les maisons, arrachent les occupants du lit pour les traîner, en tenue de nuit, sur la place de l’église où hommes et femmes sont séparés. A 11 heures, le maire et le curé
sont interpellés également, ensuite, ce sont tous les hommes âgés de 18 à
35 ans, ils sont 120 face aux mitrailleuses, qui sont obligés de s’entasser
dans trois camions. Jean, qui a pourtant dépassé les 35 ans, est contraint
de les y rejoindre. Alors, commence un périple infernal d’où il ne
reviendra pas, comme beaucoup d'hommes de Pexonne. Commence
alors un long calvaire, de camp de
concentration en camp de concentration, d’abord le
STRUTHOF (près de Schirmeck), puis DACHAU, BUCHENWALD, MAUTHAUSEN de
triste mémoire et MELK. MELK est un camp d’extermination où 5 personnes, tête
bêche, occupent un grabat prévu pour une seule.
Même la nuit, les gardiens empêchent les déportés de se reposer, en
sillonnant le camp au volant de leur voiture et en klaxonnant sans cesse. Le détenu,
à bout de nerfs, qui se montre à la porte du baraquement est mitraillé systématiquement
. C’est
le 9 février 1945 que le four crématoire va réduire en cendres le corps
meurtri de Jean Edelbloude. Ce corps, qui pendant six longs mois a subi
l’indicible, privations, sévices de toutes sortes, la faim, les coups, le
manque de sommeil. Les registres, fort bien tenus par les autorités de Mauthausen-Melk, nous permettent de situer exactement la fin du calvaire de Jean Edelbloude. Le 11 novembre 1945, Monsieur LIARD, maire de Dieuze a remis au jeune Jean-Marc EDELBLOUDE, âgé de 5 ans, la médaille de guerre avec palmes, à titre posthume. Celui-ci tenait par la main son jeune frère Pierre, né le 31 mars 1942 à Pexonne. Cette cérémonie s’est déroulée devant le monument aux morts de Dieuze.
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